Toi vélo tu étais -jusqu'à une période récente- entreposé dans ce local.
Tu n'étais pas souvent de sortie, il est vrai, mais enfin tu étais mon vélo.
J'avais oublié que je t'aimais.
Tu devais prochainement retourner gambader dans ta campagne natale, où tant de fois tu m'avais cahotée dans les chemins creux, dans des virées destinées à trouver du cresson pour des élevages illégaux de tétards, dans les après-midi brumeux des dimanches d'hiver où la balle perdue du Paul n'était jamais très loin, dans les excursions familiales où mauvaises hormones d'adolescence, gadoue et performance physique se conjugaient dans le désir d'un chocolat chaud ou d'un sirop d'orgeat -au gré des saisons.
Toi vélo, tu n'es plus. Tu as été aussi subitement que cruellement kidnappé.
Je me sens coupable de t'avoir délaissé si longtemps là, dans ce local poubelle sombrement privatisé, cadenassé d'une double verrou, où les seules conversations que tu pouvais avoir concernaient le tri sélectif, voire les encombrants.
Je t'ai oublié à grand coups de forces motrices, d'électricité, d'essence et de lignes aériennes. Parfois même je t'ai trompé avec les ersatz qu'un publicitaire véreux a savamment marchandé avec la ville, qui portent un nom honteux confondant l' opération de communication avec les valeurs républicaines.
Armoise, c'était ton doux matronyme, je me souviens encore de ce beau jour des années 90 où je t'avais rencontré à Cora Vesoul, de tes iris vert forêt, de ton porte gourde de mauvais goût, de tes dégonflaisons chroniques, de ta dynamo pathétique.
Je t'ai aimé, je t'aimais, je t'aime toujours, je te regretterai.
Cycle in peace.
J'en suis toute retournée...
RépondreSupprimerJ'espère qu'il reviendra et que cette disparition subite n'était qu'une fugue, un moyen de te dire qu'il souhaitait se décrasser un petit coup.
Merci Lisa pour ta compassion.
RépondreSupprimerJ'espère juste qu'il n'a pas trop souffert (que ce n'est pas la méchante voisine qui l'a jeté), mais qu'il a une seconde vie avec quelqu'un qui le rend heureux.